EA
4437


Systèmes Géographiques Complexes



Frontières, limites, discontinuités, ruptures, mutations

 

 

Directeur :
Jean-Luc Mercier
jlm@unistra.fr
03.68.85.09.08

Adresse :
Faculté de Géographie et d'Aménagement
3, rue de l'Argonne
67083 Strasbourg

Ruptures et discontinuités

____________________________________________________


1.1. Ruptures et discontinuités : la question des échelles spatio-temporelles dans les systèmes complexes (animateur scientifique : Patricia Zander MCF) [Contact : patricia@equinoxe.u-strasbg.fr]

Problématique : les échelles dans un système géographique complexe

La question des échelles spatio-temporelles représente depuis longtemps un des champs les plus importants de la recherche géographique.
L’approche par les systèmes a ainsi déjà mis en évidence à la fois la spécificité de chaque niveau d’échelle de complexité induite par l’émergence de propriétés particulières à ce niveau, et la permanence de certaines caractéristiques « à travers » l’ensemble des échelles du système.
Ainsi, de nombreuses discontinuités ou limites ne sont importantes qu’à certaines échelles, pour devenir insignifiantes dans un système de référence différent. D’autres discontinuités en revanche se répliquent à diverses échelles pour constituer par leur permanence de remarquables éléments structurants.
L’ « effet-frontière » en est un exemple particulièrement significatif.

Objectifs de la recherche

Deux pistes de recherche seront explorées conjointement.

◊ Recherche sur les processus systémiques d’articulation des échelles dans un système géographique complexe. La notion de complexité renvoie à une réalité qui ne peut être approchée à une échelle unique, car elle met en interaction l’ensemble des niveaux d’échelle systémiques considérés.
Comment s’effectue cette articulation d’échelles : selon quels processus systémiques ?

◊ Le second objectif est d’ouvrir une piste de travail associant recherche « fondamentale » et recherche opérationnelle.
La question de l’articulation des échelles est une question cruciale en aménagement.
Elle est posée particulièrement par rapport aux limites des territoires et leur ajustement par rapport aux réalités fonctionnelles : concurrence (économique, en matière d’équipements) productive ou contre-productive entre communes par exemple.
Le développement urbain actuel ne cesse de reposer cette question au travers de la « bonne gouvernance ».
Cette gouvernance est l’une des clés de l’émergence des espaces urbains spécifiques à notre siècle.
Démarche de travail Dans les deux cas, nous partirons d’exemples pris dans nos domaines de recherche particuliers, nous chercherons à y identifier l’ensemble des processus recensés, à formaliser leurs propriétés, à préciser et, si possible modéliser leur fonctionnement. Dans un second temps, nous entamerons la réflexion sur une approche généralisée de ces processus, en sollicitant les chercheurs d’autres disciplines et en amorçant une recherche en réseau avec d’autres équipes en géographie et en sciences sociales.
Des séminaires auront pour but, dans la perspective de l’organisation du colloque, de défricher des pistes de recherche.

1.2. Les exemples d’études : frontières, échelles, espace-temps, gestion urbaine, changements urbains.

Dynamiques métropolitaines, échelles spatio-temporelles et production de nouvelles frontières, limites et discontinuités : P. Zander, J.J. Gross, G. Herr, J.-L. Mercier

Les métropoles sont entendues ici comme la Zwischenstadt (Sieverts, 2004) : ces espaces sont polycentriques, tentaculaires, segmentés socialement, économiquement, morphologiquement et pourtant également intégrés par de multiples relations politiques, fonctionnelles et culturelles.
La ville était régie par les relations centre-périphérie, productrices de frontières nettes.
Ces frontières correspondaient à une superposition de limites, visibles et invisibles : paysages, tissu social et modes de vie, dynamiques économiques.
Deux systèmes -rural et urbain- étaient bien différenciés.

La métropole est un tissu de relations beaucoup plus complexes où les anciennes frontières urbaines, devenues des marges (le périurbain, le rurbain), ont progressivement « fondu » : les centres majeurs des métropoles s’articulent désormais de manière étroite avec des centres secondaires, par des relations domicile-travail, par des espaces de loisirs communs par exemple.
Les communes éloignées de ces centres sont évidemment « embarquées » dans ces changements spatiaux.
Ceci s’exprime notamment par les formes de croissance du bâti ou la vie sociale (renouvellement de la population résidente).
La métropole devient un espace magmatique et différencie : des ruptures spatiales peuvent être repérées qui constituent nos domaines d’investigation ; le Rhin Supérieur mais aussi dans les pays émergents (Maroc, Turquie) sont utilisés comme terrains.

◊ quels sont les processus en œuvre concernant la croissance du tissu bâti (J.L. Mercier cf. 3.3.5)

◊ l’espace périurbain et rurbain s’effacent au profit d’un espace métropolitain fait « d’éclats urbains » : des lotissements, des zones commerciales, des centres muséifiés … Quelles sont les réalités et les dynamiques actuelles qui amènent la fermeture de plus en plus visible et parfois revendiquée de parcelles urbaines ? Nous faisons référence notamment aux parcs d’activités économiques surveillés et fermés, aux résidences fermées et sécurisées, aux complexes commerciaux fermés et sécurisés.
Quel système d’acteurs soutient ces logiques de fermetures spatiales ? Cette piste a été explorée par le biais de travaux d’étudiants (Atelier en Master 2 AUDT ; rapports de stage (2007) et recherches (P. Zander 2007c).
Elle doit être poursuivie car elle est étroitement associée à la question du politique et la production de frontières, un enjeu essentiel pour la dynamique métropolitaine.

◊  en effet, des dynamiques contradictoires sont-elles susceptibles d’émerger pour enrayer cette fragmentation urbaine fondée sur des séparations autant physiques que sociale et fonctionnelles dans l’espace ? La ville a toujours présenté une grande diversité de micro-espaces plus ou moins bien reliés.
L’articulation était le fait notamment des espaces publics ouverts et appropriés par la population.
Comment se réinvente aujourd’hui la « vie commune » des métropolitains ? Ici, les travaux de G. Herr sur l’espace périurbain en mutation, ceux de J. Gross sur la production urbaine et ses cadres contemporains, et P. Zander sur la gestion économe de l’espace (Revue d’Allemagne, 2007) constituent les socles de ce programme.
L’hypothèse centrale soutenue ici est que les pouvoirs politiques locaux font « ciment » grâce à la création de nouveaux type d’espace publics porteur d’urbanité ; pour créer ces nouveaux espaces publics, les pouvoirs politiques doivent produire de nouvelles frontières, spécifiques et adaptées au système métropolitain en formation.
La production de ces frontières passe par une articulation d’échelles temporelles et spatiales de l’espace métropolitain.
Les limites et discontinuités devraient être pour leur part le fruit des acteurs privés ou des partenariats public-privé.

Adaptation - mutation - transformation

Prendre en considération des besoins nouveaux de la Société, nécessite une adaptation du système de production du cadre bâti à ces mutations.
L’ "aménagement" reste avant tout une pratique, nourrie des conceptions de l’intérêt général, mais qui doit intégrer les processus de l’individualisation inhérents au fonctionnement de la Société actuelle.
La complexification de la démarche visant à produire de l’ « espace », constitue une suite logique.
On assiste par conséquent à l’apparition de décalages entre l’héritage du passé, et les réponses actuelles apportées par les nouvelles façons de faire ou procédures.
L’objectif de ces dernières est d’arriver à satisfaire les changements pour lesquels la règle et le projet ne sont plus seuls, suffisants ou adaptés.
La production de l’espace bâti devient un système multi-varié, qui laisse toute sa place aux différences…

Si l’on se réfère, par exemple, à la procédure de lotissement largement utilisée ces dernières décennies, celle-ci est sujette à polémique et cristallise les dysfonctionnements dans la création de l’espace bâti. Au-delà de ce constat, il y a lieu :

◊  de démonter les mécanismes producteurs d’espaces bâtis ;
◊  de comprendre :
où apparaissent les distorsions.
ce qui les fait naître dans les comportements actuels, dans la perspective de la « réalisation idéale ».
Il s’agit, par conséquent, d’une approche qualitative :
◊  qui contient le jeu des acteurs - décideurs ;
◊  qui critique et précise celui des partenaires traditionnels ;
◊  qui propose d’intervenir ou de compléter les démarches.

1.3.Les exemples d’études : Mutation des marges urbaines et développement durable (doctorat G. Herr)

Face aux enjeux du développement urbain contemporain, générateur d’étalement urbain et de déplacements toujours plus important, la réflexion portera sur l’émergence de nouveaux espaces urbains aux franges des Métropoles.
Intégrant le pari d’un développement urbain viable, il s’agit de chercher quelle structure, tant formelle que politique, pourrait faire de ces espaces hérités d’une histoire rurale, rattrapés par la métropolisation (actuellement zone de transition entre la structure urbaine reconnue et intégrée et l’espace rural), le support d’une urbanité locale.
Quelle réponse donner au développement métropolitain pour que ces franges urbaines ou « banlieues » deviennent des espaces de vie à part entière, support d’un développement polycentrique de l’espace métropolitain, et non plus des espaces de relégation sociale à la seule fonction résidentielle.
Pour être réalisée, cette étude s’appuiera sur :

◊  des enquêtes de terrains auprès des acteurs locaux et métropolitains
◊  l’analyse et le croisement de l’ensemble des données foncières et prospectives (SIG, INSEE, CCI, Étude urbaine, PLU/POS…),
◊  des simulations par système multi agents de la transformation de la structure relationnelle et d’habitant afin de comparer différents scenarii tendanciels,
◊  des photomontages et intégration paysagère fine afin d’évaluer les potentiels paysagers,
◊  une recherche bibliographique permettant l’évaluation et la comparaison avec des recherches analogues antérieures.

1.4.Les exemples d’études : Mutations de systèmes ruraux complexes

Analyse et fonctionnement des sociétés rurales (Inde, Madagascar, Sénégal)

Ces systèmes sont difficiles à découper en plusieurs sous-systèmes, mais il est possible de classer les éléments en diverses rubriques : les potentialités et les contraintes naturelles, les structures de population et de démographie, les systèmes de production, les structures agraires, les encadrements institutionnels et économiques, les paysages agraires eux-mêmes enfin.
Chacune de ces rubriques est porteuse d’un grand nombre de variables.
Les interrelations entre ces dernières sont fortes, enchevêtrées, et sont donc porteuses d’actions et de réactions elles-mêmes complexes, parfois inattendues pour le chercheur confronté à des logiques qui lui sont peu familières.

Cette dynamique conduisant à un réel développement socio-économique n’affecte pas tous les systèmes complexes, quand on ramène ceux-ci à l’échelle d’un État, d’une région, d’un village.
L’exemple des Hautes-Terres malgaches présente au contraire une évolution régressive, qui peut être qualifiée d’involution, sous l’effet de facteurs internes et externes : croissance démographique accompagnée d’une saturation des terroirs utiles, blocages techniques, nationalisation des circuits commerciaux, manque de propositions de paquets techniques de la part des pouvoirs publics.
L’ensemble du système finit par être touché par ces processus régressifs selon des liaisons fort complexes entre les éléments.

On se propose d’approfondir et de formaliser la structure et la dynamique de ces deux systèmes, en commençant par l’échelle du village et en poursuivant à l’échelle régionale.
Un travail qualitatif précèdera une étape plus quantitative à exercer en équipe.

Systèmes ruraux et développements opérationnels (Bénin, Togo, Sénégal, Congo)

Les modes de mise en valeur des milieux peuvent être considérés comme le produit des règles d’accès aux ressources naturelles et des techniques de production et d’organisation de l’espace des différents groupes d’acteurs locaux.
Les différentes politiques menées au niveau national ou international (mondialisation) se traduisent dans le fonctionnement des sociétés rurales par des décisions ou des incitations prises par le pouvoir central, interprétées et appliquées avec plus ou moins de vigueur et d’efficacité par les pouvoirs locaux.
Ces ensembles de conditions successives déterminent plus ou moins étroitement le cadre du jeu des acteurs sociaux.
Les réponses des collectivités et des individus s’inscrivent dans le paysage et induisent des modalités nouvelles d’évolution des écosystèmes.
L’inadaptation ou la désadaptation des techniques de mise en valeur peuvent être la cause d’une évolution régressive des milieux.
Face à ces crises, les paysans sont conduits à modifier leurs stratégies à l’intérieur des limites imposées par les contraintes sociales, démographiques, administratives, économiques et permises par leur savoir faire technique.
Les évolutions des milieux sont donc en étroites interactions avec les dynamiques sociales et, plus largement, avec les conditions économiques, juridiques, institutionnelles dans lesquelles sont placées les communautés locales.
A l’exemple des erreurs techniques et humaines constatées lors d’opérations de développement, il sera proposé d’étudier la manière de remédier aux défauts de certains aménagements en proposant des moyens cohérents pour remobiliser une ou des populations rurales désemparées.

____________________________________________________

Université de Strasbourg